vendredi 6 novembre 2009

Y a comme un DIC

Le Droit à l'image collectif (DIC), qui permet d'exonérer jusqu'à 30% des revenus d'un joueur, pourrait disparaître dès le 31 décembre alors qu'il devait se poursuivre jusqu'en 2012. Une idée qui entraîne une rébellion du sport français.

"Inefficace, injuste et incontrôlable" a déclaré Roselyne Bachelot, mais de quoi parlait-elle ? De son plan contre la grippe A ? De son action au ministère de la santé et des sports ? Du rôle de Rama Yade au sécréterait des sports ? Bien que toutes ces réponses soient plausibles, elle visait le DIC (Droit à l’image collective). Cette fameuse niche fiscale instaurée par un gouvernement de droite en 2004 sur la proposition du ministre des sports de l’époque Jean-François Lamour, actuel député.
Seulement, depuis, le monde fait face à une grande instabilité économique. De fait, chaque euro est bon à prendre pour l’état et chaque mesure populaire est intéressante politiquement. Alors toucher aux multi millionnaires footballeurs (une poignée sont dans ce cas), quitte à oublier les salaires classiques du foot et surtout les autres sportifs, dont les salaires varient entre 1200 et 20 000 euros selon les disciplines, sur sept à dix ans. Le tout pour récupérer 30 millions d'euros. Sans surprise, 65% des français soutiennent cette suppression contre 27% qui y sont défavorables. Seuls les français intéressés par le sport (40% de la population) sont partagés avec 49% pour la suppression et 50% contre (sondage réalisé par le CSA pour l’Équipe).
Mais le gouvernement en soutenant l’amendement en provenance de Marc Le Fur (UMP) a mis le feu au sport français. Un sentiment de révolte renforcé par le vote positif de l’assemblée (91 voix pour, 22 contre) et des propositions du sénat. Ce dernier préconise, parle biais de deux commissions, le choix entre une entrée en vigueur au 30 juin 2010 (soutenue par le gouvernement), au lieu du 31 décembre 2009, ou une disparition progressive jusqu’à la date initialement prévue, en 2012.

Conséquences politiques
La mesure n’a pas seulement provoqué des tensions au sein du sport français. Rama Yade et Xavier Bertrand ont rejoint le point de vue des sportifs. La secrétaire d’état est même passée à deux doigts du licenciement pour avoir signalé que "le DIC a démontré son efficacité puisqu'il a permis de retenir ou de faire revenir certains joueurs professionnels en France". Nadine Morano, secrétaire d’état à la famille, allant même d’un « on se tait ou on démissionne. » Son prédécesseur et ami du président Bernard Laporte a d’ailleurs déclaré qu’il aurait démissionné s’il était toujours en fonction.
Mais la critique initiale de la ministre semble profondément "inefficace, injuste et incontrôlable". Car ses propos traduisent un manque cruel de connaissance du milieu sportif. Elle juge la compétitivité des clubs "pas renforcé", la semaine où Bordeaux et Lyon se qualifient, à deux journées de la fin de la phase de poule de la C1, pour les huitièmes de finale. Un timing plutôt désastreux. Surtout qu’elle avait déclaré à l’assemblée, quelques jours auparavant, que le DIC n’avait pas permis « de conserver les meilleurs joueurs de football. » Alors comment analyser les retours de Yoann Gourcuff, Gregory Coupet, Claude Makelele ou Ludovic Giuly, les arrivées de Lucho ou Lisandro, la conservation de Niang, Diarra ou Bastos ? Et dans les autres sports ? Car le DIC touche aussi le rugby, le handball et le basket-ball, un fait qui semble être oublié par les autorités. En rugby, Chabal, Dupuis et Michalak sont revenus en France, Wilkinson, Stein, Carter (reparti en Nouvelle-Zélande après 10 mois à Perpignan) ou Kelleher y sont venus. Et en handball, le meilleur joueur du monde en 2008, Nikola Karabatic est revenu dans son club formateur, Montpellier, grâce au dispositif.
Dans les faits, Lyon perdrait 6 millions d’euros par ans, Bordeaux 2,7 millions et Boulogne au bas de l’échelle, 0,4 million. En rugby, le Stade Français aurait une perte de 0,8 million. En basketball, le champion de France Villeurbanne perdrait 150 000 euros. Et en handball, le manque à gagner pour Montpellier serait de 280 000 euros. De quoi provoquer une grève dans le sport français? Une possibilité. En attendant, le rugby a déployé des banderoles avant chaque matches de la 12e journée du Top 14 "DIC supprimé, le rugby en danger."

Le sport en déclin ?
Jean-Louis Triaud, président des champions de France de football, a précisé "Je ne veux plus entendre un seul député dire que l’on est nul en coupe d’Europe." A moins que les autres nations n’imitent l’exemple français. En ce sens, en Espagne « la loi Beckham » - puisque l'anglais fut le premier cas d’envergure médiatique à en profiter, lors de sa signature au Real Madrid - qui fait tomber le taux d’imposition de 43% à 24% pour tout nouveau travailleur étranger. Or le parlement envisage de plafonner cette ristourne pour tout salarié touchant moins de 600 000 euros par ans, soit peu de footballeurs et surtout pas les Kaka, Ronaldo et Ibrahimovic qui les reçoivent au bas mot par mois. Mais quand l’Allemagne prévoit des baisses d’impôts et la Russie ou l’Ukraine, aux clubs progressant ou dominant les sports de salles, n’envisagent pas de telles mesures.
Alors, pour assurer un minimum d’égalité dans la société, il serait peut être temps de songer à regarder du côté des artistes, qui eux aussi bénéficient de certains avantages, quand ils ne sont pas carrément partis à l’étranger. Comme le feront dans les prochains mois les meilleurs sportifs exerçant jusqu'alors en hexagone.

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